L’incidence de la surdité
sur la construction de concepts géométriques.

Concept géométrique d’aire, de surface plane
avec des élèves déficients auditifs
 
 

Sommaire


INTRODUCTION

I)-Influences linguistiques dans l’abstraction

A)-Les apports de Piaget et de Vygotski

B)-Le statut de la Langue des Signes au cours de son histoire

C)-Langue signée et spécificités cognitives

II)-La problématique des apprentissages chez l’enfant sourd

A)-L’importance des échanges de l’enfant sourd avec son milieu familial

B)-Compréhension des difficultés cognitives chez l’enfant sourd

III)-La construction d’un concept

A)-Qu’est-ce qu’un concept

B)-Situations adidactiques

C)-Théorie des champs conceptuels

IV)-Cadre institutionnel

V)-L’enseignement de la géométrie

VI)-Analyse de l’acquisition du concept d’aire et de sa surface

Trois cadres :

A)-Cadre géométrique

B)-Cadre des grandeurs

C)-Cadre numérique

CONCLUSION

NOTES

BIBLIOGRAPHIE
 
 






INTRODUCTION






Ces six dernières années j’ai enseigné à des élèves de fin de cycle 3. A cet âge, stade des opérations concrètes chez Piaget, l’élève commence à raisonner à partir d’opérations intellectuelles que l’enseignant se doit d’accompagner et de développer.

L’enseignement des Mathématiques m’avait permis d’observer et d’analyser la variété des difficultés d’apprentissage rencontrées par les élèves lors de l’acquisition de différents concepts.

La possibilité de suivre une formation au CNEFEI en tant que stagiaire CAPSAIS option.A m’a donné l’opportunité de suivre un atelier mathématique avec des élèves sourds d’une classe annexée dans une Section d’Enseignement Général et professionnel Adapté d’un collège.

Une réflexion s’est spontanément imposée , à savoir ; en quoi la privation partielle ou totale d’un sens : l’audition , peut modififier le développement cognitif de l’enfant sourd et quelles sont les stratégies de remédiation que l’enseignant peut mettre en œuvre afin que l’élève sourd s’approprie un concept .

Enseigner à des enfants sourds nécessite en effet " Une connaissance sur les plans de la construction de l’individu, de son développement cognitif et social, de ses modes d’appropration des savoirs, des conséquences communicatives, langagières et linguistiques "1.

Au cours de ce mémoire je m’efforcerai donc de cerner la problématique des apprentissages liée à une déficience auditive et à l’absence d’une maîtrise de la langue orale, ainsi que les implications qui en résultent au niveau cognitif . Ce qui m’amènera à définir la place et le rôle du langage dans le processus de conceptualisation, ainsi que le processus de conceptualisation lui-même.

La classe dans laquelle se déroulent les ateliers mathématiques fait l’objet d’un projet linguistique bilingue, français et langue des signes française (L .S.F), auquel participent une enseignante spécialisée option A et un adulte sourd professeur de L.S.F. qui m’ont apporté à plusieurs reprises le lexique L.S.F qui me faisait défaut.

Les enseignements dispensés s’effectuent principalement en langue des signes, ce qui pose inévitablement le problème de savoir si ce mode d’expression peut avoir une incidence sur le développement cognitif des élèves sourds signeurs et si l’acquisition de concepts mathématiques se trouve modifiée par ce moyen de communication.

En me basant sur les travaux de psychologues cognitivistes tels que C.Courtin, G.Vergnaud et Oléron qui ont étudié les échanges de l’enfant sourd avec son milieu familial et du choix linguistique retenu par la famille, oral ou L.S.F, je tenterai d’apporter un éclairage sur les problèmes sociaux et affectifs qui peuvent s’ajouter à la déficience pour placer l’élève en difficulté scolaire.

Face à des élèves déficients auditifs et en difficulté scolaire de surcroît, il convient d’adapter ses enseignements et les situations didactiques que l’on souhaite présenter pour éviter d’entrer dans un cadre théorique qui laisserait la part belle aux explications formelles.

Tenir compte des enseignements que nous a apporté la connaissance du handicap que peut générer la surdité fut notre ligne directrice pour mes deux collègues et moi-même, encadrés par une formatrice, pendant 19 séances d’atelier.

Parmi ces séances, douze furent consacrées à l’acquisition des concepts géométriques de surface, d’aire et de mesure d’aire par douze élèves agés de 12 à 15 ans .

je présenterai enfin les stratégies d’enseignement élaborées, par notre groupe d’enseignants, afin de rendre accessible la recherche des élèves dans la construction de leurs savoirs ( la progression de nos interventions est jointe en annexe 1).

Enfin j’étudierai les procédures développées par l’élève sourd pour l’acquisition du concept d’aire de surfaces planes ainsi que ses interactions avec ses pairs et les enseignants.

I)- INFLUENCES LINGUISTIQUES DANS L’ABSTRACTION

De nos jours le débat d’idées entre la pensée et la langue porte sur différents aspects : celui de savoir si la pensée peut s’exercer en dehors de la langue (conception spiritualiste), ou si la langue joue un rôle dans la maturation de la pensée (conception nominaliste) et enfin si la structure de la langue induit un rapport au monde et au raisonnement ( relativisme linguistique). Je reprendrai l’hypothèse de Sapir-Whorf citée par Auroux(1996) dans la thèse de C .Courtin2 :" Chaque langue est un vaste système de structures différent des autres, dans lequel il existe un ordonnancement culturel des formes et des catégories qui non seulement permet à l"individu de communiquer, mais également analyse le réel, remarque ou néglige des types de relation et de phénomènes, canalise son raisonnement et jalonne peu à peu le champ de sa conscience ".

Avant d’étudier plus en détails les spécificités de la langue des signes française dans sa capacité à exprimer l’abstrait et l’influence qu’elle peut avoir dans le développement de la pensée de l’élève sourd, parcourons les travaux menés sur le langage et son rôle sur la pensée par deux figures emblématiques de la psychologie cognitiviste : Jean Piaget et Lev Vygotski.

A) LES APPORTS DE PIAGET ET DE VYGOTSKI

Les travaux de J.Piaget concernant l’évolution de la fonction du langage distinguent plusieurs stades jusqu’au stade de la socialisation du langage, stade " de la discussion véritable ".  Mais ce qui semble intéressant à retenir c’est la notion de " langage égocentrique " par opposition au langage socialisé.

Le langage égocentrique (soliloque) est ainsi qualifié parce que l’enfant ne cherche pas à se placer du point de vue de l’interlocuteur, l’enfant ne parle que de lui-même, c’est une sorte de monologue . Ce langage ne fait qu’accompagner, compléter et renforcer l’activité motrice de l’enfant et ne joue aucun rôle dans sa pensée, il tient davantage de la rêverie que de la logique. Pour Piaget la pensée est issue de l’action et le langage ne fait qu’étendre les compétences de l’enfant à d’autres domaines de la pensée :

-Piaget pense que le problème de la relation entre langage et pensée, en ce qui concerne les opérations concrètes, est de savoir si classification et sériation qui sont des opérations de la pensée, sont le fruit du langage ou en sont indépendantes.

Il prend pour exemple la réunion et la dissociation de classes (addition-soustraction) et remarque chez l’enfant de sept-huit ans que les opérations qui permettent de réunir ou dissocier des classes sont des actions avant d’être des opérations de la pensée.

 " L’enfant ne saura, classer que des collections d’objets dans un même champ perceptif et réunis ou dissociés par la manipulation avant de l’être par la langue. "

Les opérations effectuées sur les classes sont des coordinations d’actions puis elles deviennent verbales, le langage n’est donc pas la cause de leur formation.
 
 
 
 

Ainsi, pour Piaget les différents stades de la pensée logique verbale s’ordonnent de la manière suivante : Pensée autistique non verbale langage égocentrique langage socialisé et pensée logique.

Les recherches menées par Piaget s’opposent en partie aux travaux de Vygotski qui prend en compte les interactions de l’enfant avec son milieu social dans le développement de sa pensée où le langage est un instrument d’échange. En se référant à Piaget, Vygotski pense aussi que l’intelligence de l’enfant se développe par l’action, mais que le développement du langage et de la pensée suivent deux chemins distincts et ne se rencontrent que vers l’âge de deux ans lorsque les compétences intellectuelles de l’enfant le permettent.

Le langage jusqu’alors utilisé pour communiquer avec le milieu dans lequel évolue l’enfant sera ensuite intériorisé , le langage égocentrique est alors l’intermédiaire entre le langage de la communication avec autrui et le langage intérieur. Vygotski observe une nette augmentation de la proportion de langage égocentrique chez l’enfant (il existe aussi chez l’adulte) au fur et à mesure que la tâche à effectuer est difficile à surmonter. C’est seulement chez l’enfant plus âgé ou lorsque les opérations cognitives se font correctement que l’enfant pense les mots plutôt qu’il ne les dit. Progressivement le soliloque s’intériorise et devient silencieux (langage intérieur). Le langage égocentrique est pour Vygotski, et contrairement à Piaget, le chaînon entre langage extériorisé puis le langage intériorisé qui permet la plannification de stratégies de réflexion, la vérification et la validation d’hypothèses.

Ainsi pour Vygotski le schéma de la formation du langage intérieur se présente sous la forme:
 
 
 
 

Langage social langage égocentrique langage intérieur.

" Le langage intérieur est un langage pour soi. Le langage extériorisé est un langage pour les autres. On ne peut concevoir que cette différence radicale et fondamentale dans les fonctions de l‘un et de l ‘autre puisse ne pas avoir d ‘effets sur la nature de leur structure (...)

Le langage extériorisé est un processus de transformation de la pensée en paroles, sa matérialisation, son objectivation. Le langage intérieur est un processus de sens inverse, qui va de l’extérieur vers l’intérieur, un processus de volatilisation du langage dans la pensée. "

Vygotski remarque au cours de ses expériences que le langage égocentrique possède une particularité syntaxique bien spécifique ; plus il se développe plus il devient décousu et fragmentaire, dans les situations qu’il connaît, l’enfant omet des mots qui se réfèrent aux aspects qu’il maîtrise, seul le prédicat est mentionné alors que le sujet et ce qui s’y rapporte disparaît. Ce qui semblerait-être la forme syntaxique fondamentale du langage intérieur.

Les études menées par Laura Berk3 , confortent les thèses de Vygotski ; l’enfant qui a des troubles de l’apprentissage compense ses difficultés par un accroissement du soliloque. La qualité de l’interaction entre l’adulte et l’enfant stimule la maîtrise de soi à travers le soliloque. Lorsqu’un adulte aide un enfant à accomplir une tâche nouvelle, il lui propose les moyens d’y parvenir (Zone Proximale de Développement). L’enfant incorpore alors les mots de cette conversation dans son soliloque : il les utilisera ensuite pour orienter ses efforts. Les enfants qui progressent le plus sont ceux qui passent le plus vite du langage égocentrique au langage intérieur, l’auteur précise qu’il faut laisser le temps aux enfants et ne pas précipiter ce passage.

Il semblerait donc que pour l’enfant sourd la non-maîtrise d’une langue orale et l’absence de langage égocentrique soient un handicap majeur à l’existence d’un langage intérieur. Il faut alors une langue qui lui soit facile d’accès , qui ne prendrait pas comme support le mot mais le signe gestuel de la langue des signes, pour ensuite revêtir un corps représentationnel, des images mentales indépendantes du langage, pour se " volatiliser dans la pensée ".

Encore faut-il que cet enfant puisse apprendre la L.S.F, le rôle de l’adulte est fondamental non seulement pour permettre à l’enfant sourd de s’approprier une langue dès son plus jeune âge (rôle des parents et des services d’accompagnement familial et d’éducation précoce) mais aussi pour guider l’enfant vers l’acquisition de nouvelles techniques.

En tant que pédagogue, l’enseignement que l’on peut développer à partir des recherches de ces deux géants de la psychologie cognitiviste peut s’orienter selon plusieurs axes :

-d’une part celui de l’action prônée par Piaget ou l’élève s’approprie les concepts en agissant directement sur les objets. L’enfant acquiert de nouveaux concepts en les réinventant, il entre dans le processus actif de construction de son savoir. C’est d’autant plus prégnant avec l’enfant sourd qu’il est démuni linguistiquement . Plus encore qu’avec l’enfant entendant, le cours magistral ne lui permettrait pas l’approche sensori-motrice et la recherche personnelle qui vont prendre directement sens et s’inscrire dans sa mémoire et sa pensée.

- Il semble aussi intéressant d’aborder la notion de " zone proximale de développement ", qui est certainement, plus encore avec l’élève sourd que quiconque, une piste de travail pour l’enseignant spécialisé.

Mais j’aborderai ces différents points un peu plus loin, dans la partie pédagogique de ce mémoire.

- D’autre part celui de l’interaction de l’élève avec son milieu : sa famille, ses camarades et l’enseignant ont un rôle prépondérant dans l’acquisition de connaissances.Les interactions sociales génèrent chez l’apprenant des structures nouvelles lui permettant alors de participer à des interactions sociales plus élaborées, qui à leur tour deviennent source de développement cognitif. Tous ces intervenants sont des vecteurs de communication qui échangent des informations, des connaissances. En classe les élèves sourds signeurs communiquent entre-eux en L.S.F , dans quelle mesure cette langue permet-elle le transfert et l’intégration de nouveaux processus cognitifs ?

Son aptitude à l’abstraction fut l’objet de nombreuses polémiques au cours de son histoire, et fut à l’origine de son interdiction dans l’éducation des sourds pendant près d’un siècle.

B)-LE STATUT DE LA LANGUE DES SIGNES AU COURS DE SON HISTOIRE

1881, l’abbé Giulio Tarra président du Congrès de Milan disait4 " Il est beaucoup plus difficile par la mimique que par la parole d‘élever le sourd-muet aux idées abstraites et de l’amener à réfléchir et à penser à ces objets qui n’ont pas une image ,une figure visible.Tandis que le langage des signes rend concret même l’abstrait dans son image, parce qu’il dessine tout, il représente tout ; la puissance du langage au contraire rend abstrait même le concret... "

Ce détracteur de la langue des signes n’était pas le premier , c’est le mythe Judéo-Islamo-Chrétien de la parole comme don de Dieu qui avait placé la parole et le son du côté de l’immatérialité et de la spiritualité (verbe créateur) et ravalé du même coup image , signe et geste du côté d’une matérialité dévaluée.

Cette incapacité du geste à abstraire sera opposée aux arguments de P.Desloges et de l’abbé Convert4 : " La parole articulée ainsi que le signe mimique, est un signe conventionnel et n’exprime que l’idée que l’usage lui a attribué. Or dans l‘expression des idées, le signe mimique a autant de valeur et de puissance que la parole articulée. "

Ces arguments pour ou contre l’aptitude de la langue des signes a exprimer l’abstrait relèvent en fait d’une méconnaissance linguistique qui sera établie trente-six ans plus tard par Saussure à savoir la distinction entre le signifiant et le signifié.

La langue des signes recourt à des signifiants spatio-gestuels-temporels alors que la langue orale recourt, elle, a des signifiants acoustico-temporels. Or l’on sait depuis que la modalité de construction du signifiant n’interfère pas avec sa capacité à renvoyer à un signifié.

Depuis la langue des signes a obtenu son statut de langue à part entière, comme toute langue humaine elle se distingue de tout autre système de communication par le fait même qu’elle possède une double articulation. (Martinet)

Si pour la langue française, par exemple, la première articulation correspond à la combinaison d’unités signifiantes minimales ; les monèmes qui construisent le message en ayant à la fois une forme et un sens, la première articulation de la langue des signes correspond, elle, à l’enchaînement des signes dans le discours signé.

Les messages de la langue française présentent une deuxième articulation : les unités signifiantes minimales-les monèmes-sont construites à leur tour d’unités plus petites : les phonèmes qui sont des unités minimales phonologiques mais qui n’ont pas de signifié.

A cette deuxième articulation la langue des signes se distingue par la configuration de la main, le mouvement, la disposition spatiale.

C) LANGUE SIGNEE ET SPECIFICITES COGNITIVES

Un mode d’expression aussi spécifique que la langue des signes peut-il influencer le développement cognitif de celui qui l’utilise ?

Les élèves sourds de la SEGPA que je rencontre lors des ateliers mathématiques n’utilisent que la langue des signes française (L.S.F) pour communiquer. Ils sont nés de parents entendants, comme la très grande majorité de la population sourde (95%). Les parents de ces élèves maîtrisent peu ou pas la L.S.F. Bien que n’étant pas sourd signeurs natifs, les élèves bénéficient des effets de la Langue des Signes mais pas autant que les enfants exposés précocement .

Pour répondre à la question ci-dessus, je me baserai sur les travaux menés par C.Courtin et présentés dans sa thèse de doctorat en psychologie: "  Surdité, langue des signes et cognition ".

La langue des signes dispose d’une syntaxe qui repose sur trois traits :

-la perspective d’expression : le receveur du message signé doit opérer une inversion de la

scène générée par le signeur afin de se placer du même point de vue (effet miroir).

-la spatialisation linguistique :c’est un processus ou chaque entité va être assigné à un

emplacement précis de l’espace linguistique.

-la levée de perspective : le signeur change de point de vue d’élocution lorsqu’il donne

la parole à chacune des entités de son discours .

Ces trois caractéristiques de la langue des signes ont une influence certaine sur le développement cognitif de l’enfant sourd .

D’après les psychologues cognitivistes,on peut décrire la connaissance à propos de l’enfant en terme de théorie de l’esprit ; ensemble de concepts interreliés établissant une struture de connaissances.

Les théories de l’esprit sont les capacités des enfants à prédire ou imaginer que l’on peut avoir des représentations différentes du même objet, et comprendre aussi que les représentations mentales différent d’une personne à une autre.

Les spécificités syntaxiques de la langue des signes favorisent différentes prises de perspective visuelles. La réception du message signé oblige le récepteur à une division de l’attention entre le système visuel fovéal (centre du regard porté sur le visage du signeur) et le système visuel périphérique (les mains qui signent). Le recours fréquent à ces deux modes de gestion de l’attention améliore l’efficience qu’a l’enfant signeur à déplacer son attention et de passer d’une représentation à une autre.

Cette aptitude se trouve enrichie par la faculté qu’ont ces mêmes enfants lors de la prise de perspective de prendre en compte les différents points de vue d’une même réalité.

Cette compréhension de la relativité des représentations issue du niveau perceptif anènerait à une compréhension de la relativité des représentations au niveau conceptuel (épreuve de fausses croyances).

La possibilité de comparer les co-possibles, donc de mettre en œuvre des processus d’imagerie mentale dépend de la capacité qu’à l’enfant de se détacher de son premier choix, de l’inhiber afin de déplacer son attention sur d’autres pistes de recherche , un nouvel algorithme par exemple lors de la résolution d’un problème.

L’inhibition est facilitée par les dispositions des enfants sourds signeurs face à l’ambiguïté. Ces enfants sont impliqués dans un système d’appréhension visuel du monde ou les informations visuelles qu’ils reçoivent ne trouvent pas de confirmation ou infirmation auditive. L’enfant enregistre donc l’événement, émet des hypothèses relatives à celui-ci qu’il garde en mémoire afin de les confronter ultérieurement à d’autres informations. Cette capacité est encore plus marquée chez les enfants sourds de parents entendants ou la communication est mal-aisée.

En effet, l’enfant ne peut s’appuyer que sur les mouvements labiaux et parfois les sensations vibratoires de la parole pour avoir accès à la compréhension d’un message. La langue des signes intervenant généralement plus tardivement, laissant l’enfant sourd, en attendant, sans possibilité réelle de communication.

Ces dernières recherches viennent contrarier les théories d’Oléron5 (1972) dans lesquelles

Il affirmait, que l’enfant sourd ayant un faible niveau de langage avait tendance à faire preuve d’une certaine rigidité mentale, se traduisant par la persévèration dans des solutions dont il a déjà éprouvé l’échec ou d’adopter pour n’importe quelle situation des solutions qui auraient fait leurs preuves dans certaines situations.

Nous ne pouvons ici encore que souligner l’importance de donner à l’enfant sourd la possibilité de se frotter à des situations problématiques, d’échafauder des stratégies de recherche et de mettre en place des schèmes d’actions. C’est à travers des situations et des problèmes à résoudre qu’un concept acquiert du sens pour l’enfant .

C. Courtin constate enfin que l’effet de l’adaptation familiale à la communication de l’enfant est bien réel et favorise le développement des capacités exécutives de l’enfant signeur. D’où l’importance de donner à l’enfant sourd et le plus rapidement possible, les moyens de communiquer, de prendre et de donner du sens aux faits quotidiens, grâce au langage, et dans un premier temps la langue des signes semble être le médium le plus efficace. La L.S.F étant plus facilement perceptible est donc certainement comprise comme système linguistique plus tôt que ne l’est la langue orale. C.Coutin conclut que l’environnement linguistique de l’enfant signeur facilite l’acquisition de théories de l’esprit. Il confirme son hypothèse de départ, à savoir, l’existence d’une relation causale entre coordination des perspectives visuelles et coordination des perspectives conceptuelles.

II)-LA PROBLEMATIQUE DES APPRENTISSAGES CHEZ L’ENFANT SOURD

  1. L’IMPORTANCE DES ECHANGES DE L’ENFANT AVEC SON MILIEU FAMILIAL

  2.  

     

    L’enfant sourd de parents entendants, ce qui est majoritairement le cas, peut trouver des limitations à son développement cognitif au sein même de sa famille.

    Il est reconnu que lors de l’annonce de la surdité de leur enfant, les parents subissent un traumatisme émotionnel qui dans un premier temps s’accompagne d’une perte importante de la communication des parents vers l’enfant.

    Les premières phases de la réaction traumatique sont classiques des réactions de deuil chez les parents d’enfants handicapés, caratérisées dans un premier temps par le déni du handicap d’autant plus flagrant chez l’enfant sourd qu’il est invisible. Cette phase est suivie par un sentiment de culpabilité accompagnée parfois d’un rejet de l’enfant. Selon Moses les parents devront affronter d’autres phases ; le sentiment d’impuissance, la colère, la négociation avec les partenaires, avant de reconnaître leur enfant en tant que personne sourde.

    Lorsque la communication est restaurée, parfois cela prend du temps, le choix de la langue orale ou de la langue des signes a une influence certaine sur la cognition de l’enfant sourd. On remarque que les interactions dyadiques mère/enfant sourd sont différentes en fonction du langage retenu :

    -Ainsi la dyade oralisante privilégie l’expression dans sa composante de surface, le discours est simplifié, le recours à la répétition par la mère provoque des interruptions dans le dialogue. De plus les adultes répondant peu aux propos de l’enfant, ce dernier comprendra qu’une demande d’explication est peu suivie d’une réponse ou que cette réponse risque d’être tronquée. L’enfant sourd est exclu, au sein même de sa famille ; il n’entend guère ce que se disent ses parents,ses frères et sœurs autour d’un repas. Lorsqu’il arrive à comprendre souvent c’est en retard et s’il choisit d’intervenir c’est souvent hors de propos. Ses compétences lexicales sont souvent limitées et sa syntaxe est primaire voire inexistante.

    Une des limitations imposée par ce moyen de communication est que l’enfant sourd ne va pas percevoir les structures de pensée de chacun des intervenants au cours de la discussion.

    -La dyade signant privilégie, quant à elle, le contenu sémantique. "  L’utilisation précoce de la langue des signes favorise le développement de l’ensemble des fonctions cognitives de l’enfant , mémoire, structuration dans l’espace et le temps, organisation sémantique, et l’aide dans le développement génétique de la pensée. "(B.Virole6)

    D’une manière générale, mais plus encore pour les enfants sourds de parents entendants, la mère contrôle l’activité de son enfant. Ainsi à l’examen du jeu de faire semblant (voir C.Courtin) les mères oralisantes contrôlent davantage leur enfant en fonction du fait que sa compétence linguistique est moindre, et imposent davantage leur propre volonté au cours du jeu. La dyade oralisante dans les conditions décrites ci-dessus permet un accès moins aisé, de l’enfant, au fonctionnement cognitif autonome.

    Ainsi, l’enfant sourd est défavorisé, fait en partie dû à son déficit linguistique, et en partie aussi à son manque expérienciel imposé par la mère qui appréhende de livrer, son enfant, aux dangers du monde, privé de la faculté de percevoir ou de localiser les avertissements sonores.

    -Il existe toutefois des dyades mère entendante/ enfant sourd où la communication est privilégiée,  " l’adulte devient un médiateur participant à la transformation des productions vocales non signifiantes de l’enfant sourd en signes linguistiques " (Travaux de Shirley.Vinter7). Ceci est possible lorsque le ou les parents, interlocuteurs attentifs et vigilants donnent du sens aux productions vocales du jeune enfant sourd, ou du moins accordent à ces productions un statut d’objet potentiellement signifiant. L’enfant peut alors saisir l’impact des sons qu’il émet sur son entourage, le sens que l’on accorde à ses productions sonores, les réajuster et ainsi prendre place dans un schéma conversationnel et ultérieurement accéder à un bon développement du langage.

    -Enfin il y a aussi les dyades mère oralisante/enfant sourd où la communication est totale et s’appuie sur tous les supports disponibles (oraux et visuels : mimiques,éléments de L.S.F) afin de privilégier la communication et la prise de sens à tout prix, et de donner la possibilité à l’enfant de se structurer et de développer ses compétences cognitives.
    B.COMPREHENSION DES DIFFICULTES COGNITIVES CHEZ L’ENFANT SOURD

Tout enseignant se doit de comprendre les difficultés que rencontrent ses élèves, à fortiori si elles sont d’ordre cognitif , liées à un déficit perceptif . Cette compréhension me permettra d’adapter la présentation des contenus des enseignements à transmettre en proposant des situations didactiques adaptées.

Prétendre que l’enfant sourd privilégie la fonction perceptive visuelle semble être une lapalissade, contrairement à l’audition, ce mode de perception a des structures instantanées et globales qui font que la prise de sens est immédiate ( sauf cas où les informations délivrées sont incomplètes et demandent confirmation).

Aux tests de Rorschach et de complément d’image il s’est avéré que le nombre de stimuli distincts que le sujet sourd peut appréhender lors de leur présentation simultanée est supérieur à celui des entendants (travaux d’Oléron). Ce qui confirme une certaine appétence aux détails de la part des enfants sourds, qui loin d’être utile à la cognition, peut au contraire être un obstacle. En effet, la pensée formelle ne peut que s’encombrer de détails qui viendront gêner l’extraction du réel, d’une forme structurée destinée à devenir une abstraction généralisante.

Ce fut le cas, au cours d’un atelier mathématique (séance du 14/12/2000) où pour extraire le concept de surface nous l’avons opposé aux concepts de solide et de ligne. Nous avons présenté des solides, des figures planes, des droites,segments...en donnant pour consigne de classer ces objets en trois catégories. Deux détails retinrent l’attention d’un groupe d’élèves, qui furent ; la légère déchirure sur le bord d’une figure et une fine frise dessinée sur un cône qui devinrent un des critères de sériation : critère ligne irrégulière.

La perception auditive a une structure temporelle , linéaire, et la compréhension du message suit le même axe.

Benoît Virole a été amené à en conclure que le cerveau humain est le siège d e traitements cognitifs différents :- de type Séquentiel dont le processus traite l’information par séquences successives selon l’axe du temps et de type Simultané dont le processus traite l’information en bloc, simultanément sans respecter d’ordre. Ces traitements sont localisés respectivement dans l’hémisphère gauche (frontal) et l’hémisphère droit (Parieto occipital).

Catherine Brabant8 rapporte que lors du passage du test le K.ABC, les épreuves les plus échouées par les enfants sourds sont celles qui font le plus appel à l’organisation séquentielle, et que cette faiblesse se retrouve dans l’appréhension de l’organisation temporelle.

B.Douet émet l’hypothèse que l’organisation temporelle se structure entre autre grâce aux bruits qui jalonnent une action, pour Lafont10, le précurseur physiologique de la successivité est l’oreille : " horloge du temps ".

Quoiqu’il en soit, il semble que chez l’enfant sourd, les processus simultanés soient les mieux structurés et les processus séquentiels les plus touchés.

C.Braban en arrive à la conclusion  que meilleur est le niveau de communication (orale ou gestuelle) meilleur est le développement des processus mentaux et la qualité des fonctions cognitives. Il apparaît donc que le gestuel soit tout aussi efficace que l"oral pour développer la pensée.

Il ressort de cette analyse que le style cognitif de l’enfant sourd le prédisposerait à des acquisitions globales où les modes de traitement des informations sont simultanés et parallèles. D’après B.Virole, La logique inductive semblerait être une caractéristique de leur manière de raisonner, elle consiste à inférer une règle à partir d’informations ou de l’observation de faits particuliers, d’exemples. Cette logique inductive pourrait être mise à profit, et être développée lorsque le maître élabore les situations didactiques en vue d’acquérir des concepts mathématiques. C’est ce que nous verrons dans le chapître suivant consacré à la construction de concepts. Mais il serait imprudent de penser que l’enfant sourd n’a accès qu’à un seul style cognitif . Si tel était le cas, une des missions de l’enseignant serait justement d’amener l’enfant à acquérir des compétences dans les domaines qui lui font défaut .Si habituellement on a tendance à ne favoriser que le développement du raisonnement déductif , je pense en tant que pédagogue devoir utiliser ces deux canaux.

III)-LA CONSTRUCTION D’UN CONCEPT

Quelle est la place du langage dans la construction d’un concept ?

Cette question implique évidemment le corollaire suivant ; dans quelle mesure l’enfant sourd privé de la parole d’autrui peut-il avoir accès au concept?

On peut s’interroger sur ce que recouvre la notion de concept :

A)-QU’EST-CE QU’UN CONCEPT ?

Le LAROUSSE nous donne la définition suivante du terme concept : idée générale et abstraite que se fait l’esprit humain d’un objet de pensée concret ou abstrait et qui lui permet de rattacher à ce même objet les diverses perceptions qu’il en a et d’en organiser les connaîssances.

Selon Britt-Mari Barth11 un concept est une pensée abstraite désignée par " un mot étiquette "qui recouvre une liste d’attributs laquelle est susceptible d’être appliquée à des exemples . Le processus permettant de dégager un concept se déroule en trois étapes :

1) -Au moyen d’exemples et de contre-exemples dissocier les caractéristiques

essentielles du concept (attributs essentiels), des attributs circonstantiels.

2)-L’addition des attributs essentiels équivaut à une définition à laquelle on attribuera une

" étiquette ", soit un signifiant langagier, codifié ou symbolique.

3)-Enfin il y a véritablement conceptualisation lorsque cette nouvelle acquisition est

transférable à d’autres situations.

Ainsi par exemple le concept géométrique de surface, terme générique sur lequel les élèves vont travailler, se caractérise par certains attributs essentiels (espace fermé, plan, recouvrable) qui ne pourront émerger que s’ils sont confrontés à d’autres figures qui ne possèdent pas la totalité de ces caractéristiques.

Cette définition est à rapprocher de celle de G .Vergnaud12 qui définit le concept comme un triplet de trois ensembles : Concept = (S,I,S)

S : étant l’ensemble des situations qui donnent du sens au concept (la référence), et qui

correspond aux exemples porteurs des caractéristiques du concept.

I : l’ensemble des invariants sur lesquels repose l’opérationnalité des schèmes (le signifié)

que B-M Barth nomme attributs essentiels. (Un schème est un objet du même type que

l’algorithme, il lui manque la propriété d’aboutir à coup sûr en un nombre fini de pas).

S : l’ensemble des formes langagières et non langagières qui permettent de représenter

Symboliquement le concept (le signifiant) que l’on peut rapprocher du terme " mot

étiquette ".

On perçoit l’importance du rôle du maître dans le choix des situations didactiques qui seront présentées aux élèves pour favoriser l’émergence du sens lié au concept étudié. A partir des définitions données par G.Vergnaud et B-M Barth, le choix des exemples et contre-exemples que l’enseignant proposera à ses élèves permettra la levée des attributs essentiels du concept étudié, tout en mutipliant les exemples contrastés afin d’éviter d’enfermer l’élève dans une seule représentation. Ainsi pour l’acquisition du concept géométrique d’aire il nous a semblé légitime que les élèves puissent reconnaître une surface, qu’ ils soient capables de différencier une aire d’une longueur, et de différencier une surface d’un solide, donc une aire d’un volume. Sachant que les solides possèdent des " frontières " qui sont des surfaces délimitant l’intérieur de l’extérieur du solide et que les surfaces possèdent des " frontières " qui sont des lignes fermées.
 
 

B)-SITUATIONS ADIDACTIQUES

Si l’on retient un projet constructiviste d’enseignement avec l’enfant sourd, on comprendra que le savoir ne puisse être imposé dogmatiquement. Le rôle du maître est d’amener l’élève à assumer intellectuellement une situation problématique sans pour cela se substituer à la recherche de l’élève. C’est d’autant plus important avec l’enfant sourd que cette pratique expériencielle lui fait souvent défaut.(voir plus haut).

Une situation adidactique  se présente comme :

1)- un problème posé par l’enseignant avec une intention didactique que l’apprenant doit résoudre avec ses connaissances. L ‘enseignant n’intervient pas en tant que détenteur du savoir pour proposer son aide, il encourage, aide à la reformulation ou à la synthèse en laissant le soin à l’élève de trouver la solution. Ainsi par exemple, pour favoriser l’émergence du concept de surface par opposition aux concepts de solide et de ligne, nous avions proposé une situation de départ où des solides, des surfaces et des lignes (droites, segments ,courbes) avaient été mélangés et présentés pêle-mêle, les élèves en petits groupes avaient pour consigne de classer tous ces objets en trois familles, matérialisées par trois grandes boîtes, pour chaque groupe d’élèves, qu’ils devaient remplir.

2)- Le pédagogue doit-être capable d’analyser le lieu d’achoppement conceptuel de l’élève et de modifier la situation de départ, de changer quelques variables pour que la recherche puisse repartir, que l’élève puisse mettre en œuvre de nouveaux schèmes.

L’enseignant doit prévoir les écueils que vont rencontrer ses élèves afin d’avoir à sa disposition le moment voulu la réponse adaptée.

Lors de la séance sur l’extraction du concept de surface par opposition aux concepts de solide et de ligne, la situation proposée au départ (distribution aux élèves de lignes ouvertes, solides en tout genre et surfaces) avait engendré des catégorisations que nous n’attendions pas et qui ne dégageaient pas les attributs du concept de surface.

Un groupe d’élèves avait rempli les trois boîtes d’objets qui nous semblaient disparates, ce groupe avait utilisé les caractéristiques ; objets souples (en papier), objets semi-rigides (en carton ou plastique), objets rigides (en fer) comme critères de sériation.

Un autre groupe choisit les critères suivants :

- objets qui ont des lignes irrégulières (feuille de carton mal découpée, frise sur un cône) - objets ayant des formes droites (lignes droites, arrêtes des volumes, surfaces aux

contours rectilignes).

- objets ayant des formes courbes (cylindres, surfaces circulaires, lignes courbes).

Afin de réorienter les élèves dans leurs recherches nous avons donc introduit un nouveau paramètre à la situation initiale : l’ajout d’un matériau ; de la semoule, et une nouvelle consigne : remplir les objets à catégoriser, critère caractéristique du concept de volume. Dans un premier temps cet apport bouleversa les schèmes des élèves qui distinguèrent par la suite deux catégories d’objets ; une catégorie d’objets qui peut contenir et l’autre pas : 1ère étape vers l’acquisition du concept de surface !

3)-La validation de la réponse est fournie par le milieu. Une telle validation n’est pas perçue par l’élève comme un jugement mais comme l’inadéquation de la réponse à la situation et renvoie par la même l’élève à sa recherche. Ainsi, pour poursuivre notre exemple; le fait de pouvoir remplir au sein d’une même famille certains objets et pas d’autres a provoqué une rupture dans les représentations et les catégorisations des élèves.

Le maître, lors de ces situations, a un rôle dynamique puissant à jouer surtout lorsque l’élève se trouve face à un obstacle qu’il n’arrive pas à surmonter.

Ce sont les situations qui donnent du sens aux concepts mathématiques, le sens n’est pas dans les mots ou les symbôles mathématiques, le sens va se construire dans la constitution de schèmes face à la situation proposée.

L’interaction de l’enseignant vers l’élève demande une attention et un réajustement des consignes. Et c’est d’autant plus évident avec l’enfant sourd qu’il peut être amené à prendre en compte des éléments visuels parasites qui perturberaient la situation de recherche ou à utiliser des connaissances-en-acte inopérantes et persévérer (voir Oléron).

C)-THEORIE DES CHAMPS CONCEPTUELS

La théorie des champs conceptuels de G.Vergnaud a été élaborée pour rendre compte du processus de conceptualisation progressive de structures mathématiques.

Lors de la fonction adaptative de la connaissance à l’action du sujet, on distingue deux cas :

-des classes de situation ou le sujet dispose des compétences nécessaires au traitement de la situation, et dans ce cas on observe des conduites largement automatisées, organisées par un schème unique.

-des classes de situation où le sujet ne dispose pas de toutes les compétences nécessaires, on observe alors des tentatives, des hésitations, l’amorçage successifs de schèmes qui vont être accomodés pour aboutir à la solution.

" La thèse sous-jacente à la théorie des champs conceptuels est qu’une bonne mise en scène didactique s’appuie nécessairement sur la connaissance de la difficulté relative des tâches cognitives, des obstacles rencontrés, du répertoire des procédures disponibles et des représentations possibles. " G.Vergnaud.

IV)- CADRE INSTITUTIONNEL

Orientations pédagogiques pour les enseignements généraux et professionnels adaptés dans le second degré

Les élèves qui assistent aux ateliers mathématiques sont inscrits au collège en SEGPA, à ce titre ils sont soumis à la ciculaire n°98-129 du 19 juin 1998 qui spécifie que " Les collégiens scolarisés en SEGPA reçoivent une formation qui s’inscrit dans les finalités d’ensemble du collège et qui requiert des démarches Pédagogiques adaptées. "

Les finalités qui y sont poursuivies sont celles des enseignements du collège même si les programmes n’y sont pas applicables à l’identique.

Je me suis donc reporté aux programmes en mathématiques du cycle d’adaptation : classe de 6e et du cycle central en annexe aux arrêtés du 22 novembre 1995 et du 10 janvier 1997.

Notre projet en mathématiques mené avec les élèves s’inscrit dans les contenus et les compétences exigibles au collège. Ainsi la reproduction de figures planes, la comparaison et le calcul d’aires et de périmètres sont aux programme de la classe de sixième. Pour le cycle central, l’étude des figures planes se poursuit : "  Les travaux de géométrie plane prennent toujours appui sur des figures, dessinées suivant le cas à main levée ou à l’aide des instruments de dessin et de mesure, y compris dans un environnement informatique. Ils sont conduits en liaison étroite avec l’étude des autres rubriques ; ils constituent, en particulier, le support d’activités numériques conjointes (grandeurs et mesures) ".
 
 
 
 

V)-L’ENSEIGNEMENT DE LA GEOMETRIE

Les mathématiques contribuent comme d’autres disciplines, à entraîner les élèves à la pratique d’une démarche scientifique. Avec un nombre limité de connaissances, il est possible de mener une véritable recherche qui s’appuie sur : l’identification d’une tâche à accomplir, la mise en œuvre de schèmes pour y parvenir, l’expérimentation, la déduction ou l’inférence , le contrôle et l’évaluation. Autant de pratiques qui font que cette activité possède des qualités formatrices exceptionnelles.

La géométrie, discipline mathématique, est une structuration de l’espace, qui permet de passer

de la reconnaissance visuelle du monde à son interprétation au moyen de propriétés mathématiques.

Cette discipline est un excellent support de travail avec les enfants sourds puisqu’à partir de la reconnaissance de figures sous une forme perceptive globale, mode perceptif d’appréhension dominant, l’élève devra accéder à une catégorisation instrumentale et à une catégorisation par des propriétés mathématiques.

Dans le cadre de notre démarche, la géométrie à laquelle nous nous intéressons est la geométrie d’Euclide, dont les premières définitions sont des descriptions d’objets perceptibles par le biais des sens, qui est sans doute celle qui se rapproche le plus de l’appréhension de l’espace qu’ont les élèves sourds. Mais sa construction passe rapidement d’une perception pragmatique (géométrie naturelle) à un développement théorique (géométrie axiomatique naturelle). Au sein de la géométrie euclidienne nous axerons nos recherches vers la topologie : l’étude des propriétés de l’espace qui ne sont pas affectées par une déformation continue. Par conséquent, si on veut rester dans le cadre de la topologie, on a le droit d’incurver ou de distendre les frontières, ou d’en changer la forme à volonté, mais on ne peut ni les déchirer ni les casser, ni faire un trou dans la surface. Du point de vue de la topologie la notion de frontières est importante. Ainsi les frontières d’un espace à trois dimensions sont elles-mêmes à deux dimensions, pour enclore un volume il faut des espaces à deux dimensions, des surfaces. Mais pour enclore une surface il suffit d’un espace à une dimension ;  une ligne . Nous partons de ce postulat pour proposer aux élèves des situations didactiques qui permettront de faire émerger le concept de surface en le confrontant au concept tridimentionnel de volume et au concept unidimentionnel de ligne.
 
 
 
 
 
 

VI)- ANALYSE DE L’ACQUISITION DU CONCEPT D’AIRE ET DE SA MESURE

A)- DIFFICULTES GENERALES D’APPRENTISSAGE AUTOUR DU CONCEPT GEOMETRIQUE DE SURFACE ET REMEDIATIONS

Avant d’aller plus avant dans l’étude des difficultés spécifiques au concept de surface, d’aire et de mesure d’aire, nous allons mettre en évidence les élèments de base utiles à notre étude, à savoir que : 1)-Les surfaces planes sont des objets du cadre géométrique.

2)-Les aires sont des objets du cadre des grandeurs.

3)-Les mesures d’aires sont des objets du cadre numérique.

1)-On ne peut parler d’un type de grandeur donné que relativement à un certain type de support ; le support de grandeur, on parle d’aire concernant des surfaces délimitées (planes ou courbes), comme on parle de volume concernant les solides ou de longueur concernant les segments de droites.

2)- Les grandeurs (aire,longueur,volume) ne peuvent-être confondues avec les supports qui les réalisent. Une même aire peut appartenir à une surface rectangulaire ou triangulaire voire d’une figure quelconque.

3)-La mesure d’une aire donnée est un nombre qui exprime le rapport de cette aire à l’aire d’une surface-unité . A une même aire peut correspondre différentes mesures de cette aire, tout dépend de l’unité d’aire choisie.

La distinction que l’on doit apporter à ces différents termes (surface, aire, mesure d’aire) pour éviter toute confusion conceptuelle, se trouve désarçonnée lors de leur traduction en L.S.F. Pour bon nombre de concepts mathématiques et géométriques on constate des manques dans le lexique de la L.S.F . Ainsi s’il existe un signe pour nommer une surface, il n’y a pas de correspondant au terme d’aire. Quant au terme : " mesure d’une aire " ; il trouve sa traduction dans les signes : " mesure " pour une longueur et " surface ".

Lors du passage d’une consigne l’utilisation de ces signes a conduit les élèves à une mauvaise représentation de ce qui leur était demandé, en souhaitant signer : " Comment mesurer l"aire d"une surface ? ", les élèves ont compris "Comment mesurer les longueurs d’une surface ?".

La réponse n’a pas tardé ; " avec une régle !".

Pour éviter ce type d’erreur l’utilisation conjointe de l’écrit à la L.S.F est indispensable, non seulement pour permettre aux élèves de distinguer clairement les consignes et les concepts mais aussi surtout pour leur faire acquérir un lexique mathématique.

Dans certains champs lexicaux la L.S.F ne disposent pas encore de signes pouvant exprimer certains concepts récents ou très spécialisés, cet état de fait est lié à son histoire ; pendant plus d’un siècle cette langue fut interdite et ne put évoluer. Les adultes sourds référents évoluant dans les structures intégratives ou spécialisées tentent de remédier à ces lacunes au cas par cas, mais il n’y a pour l’instant pas de concertations entreprises par les promoteurs de la L.S.F, au niveau national.

B)- STRATEGIES D’ENSEIGNEMENT MISES EN ŒUVRE

Par souci de clareté et de concision nous analyserons à travers les trois cadres ; géométrique, des grandeurs, et des mesures de grandeurs, les tâches à accomplir, les objectifs à atteindre, les différentes procédures élaborées par les élèves et leurs difficultés. Mais nous étudierons aussi l’apport de l’enseignant dans ses choix didactiques, dans la construction de ses séquences, dans la gestion des procédures développées par les élèves et des difficultés qu’ils ont rencontrées au travers de ces trois cadres .

CADRE GEOMETRIQUE
CADRE DES GRANDEURS
CADRE 
NUMERIQUE
Les SURFACES
Les AIRES
Les MESURES D’AIRES
Les SOLIDES
Les VOLUMES
Les MESURES DE VOLUMES
Les LIGNES
Les LONGUEURS
Les MESURES DE LONGUEURS

 

1)- CADRE GEOMETRIQUE

L’acquisition du concept de surface par les élèves de l’atelier se heurtait à un problème, dans un premier temps les élèves n’avaient pu distinguer que deux catégories (voir plus haut): une catégorie d’objets " qui peut contenir " et l’autre " qui ne peut pas contenir ". Nous avons demandé aux élèves de caractériser la première catégorie, les réponses furent les suivantes :

-le contenu ne tombe pas, ça reste.

-On peut fermer.

-les bords protègent.

Ces réponses , nous les avons considérées comme les invariants d’une nouvelle catégorie que nous avons nommée : LES SOLIDES. Cette catégorie fut opposée à la catégorie des objets restants que les élèves ont caractérisée comme étant la catégorie des objets où :" la semoule tombe, ça glisse, papier ".

Après avoir isolé la catégorie des solides qui au regard des invariants que nous avions extraits sortait du cadre des concepts quotidiens pour devenir un concept scientifique, notre attention se focalisa sur la catégorie restante, celle où indistinctement lignes et surfaces avaient été regroupées.

Notre objectif étant de permettre l’émergence du concept de surface par opposition au concept de ligne, le seul critére disponible pour créer cette distinction était la recouvrabilité.

A partir de ce critére pouvait apparaître les notions de figure ouverte et figure fermée ; deux attributs qui entraient dans la catégorie ligne, seul l’attribut figure fermée entrant dans la catégorie surface.

Au cours de cette deuxième séance, les élèves sont répartis en petits groupes, des surfaces et diverses lignes (courbes,droites,brisées...) leur sont distribuées dans des matériaux différents, papier et carton afin que ce ne soit pas un critère de sériation.

La consigne donnée aux élèves est de recouvrir les figures sans dépasser, avec du papier de couleur.

1-1-Difficultés rencontrées par les élèves :

Christelle et Anis recouvrent le verso de la feuille sur laquelle est représentée une ligne ouverte, ils n’ont pas osé recouvrir le recto afin de ne pas recouvrir la ligne, une manière de détourner la consigne.

Lors de la mise en commun des procédures utilisées par les élèves, Sofiane explique que l’on ne peut pas recouvrir les lignes parce qu’elles sont ouvertes, on peut recouvrir les surfaces fermées. Jamila et Hélèna ajoutent : " Dans un cas on ne peut pas sortir de la figure dans l"autre cas on peut ". Nous assitons à l’émergence des catégorisations : FIGURES OUVERTES / FIGURES FERMEES que nous notons au tableau.

Nous demandons aux élèves de nous donner les caractéristiques (invariants) des figures qui peuvent être recouvertes, les élèves énoncent les trois invariants suivants que nous notons :

-C’est plat.

-On peut la recouvrir (la figure). Les figures qui possédent ces invariants

-C’est fermé. S’appellent LES SURFACES.

Le terme SURFACE que nous donnons à présent aux élèves, n’est que l’aspect symbolique et signifiant du concept qu’ils se sont construit. L’autre catégorie ne comprenant pas la totalité des attributs ci-dessus est nommée : LES LIGNES.

Si pour la totalité des élèves la notion de recouvrabilité est liée à l’invariant ligne fermée, ce n’est pas le cas de Christelle, jeune africaine scolarisée depuis une semaine!

En effet lors de l’exercice suivant nous proposons aux élèves des figures ouvertes et fermées de formes plus ou moins circulaires, ou angulaires (Annexe 2). La consigne est de nommer ces figures en inscrivant au-dessous de chacune d’elle la catégorie à laquelle elle appartient : LIGNE ou SURFACE.

Devant les hésitations de certains, (problème de compréhension de la consigne ?), nous leur conseillons non plus de recouvrir les surfaces mais de les colorier et de vérifier qu’elles possèdent bien tous les attributs cités plus haut. Après avoir recherché par induction les attributs des concepts de ligne et surface, l’activité présentée aux élèves doit les amener à opérer des déductions à partir des caractéristiques présentes ou non pour chaque figure (invariants) afin d’en déterminer la nature. La connaisance théorique ne peut être atteinte que par le fonctionnement de raisonnements logiques, le raisonnement déductif et inductif étant les deux versants du raisonnement logique.

-Dans un premier temps Christelle repasse avec un crayon de couleur toutes les lignes (fermées et ouvertes) des figures représentées , or les lignes ne sont pas des surfaces même si elles ont une épaisseur sur le papier. La ligne est un " objet mathématique " sans épaisseur car les " objets mathématiques " sont imaginaires, on peut donc les imaginer parfaits. Dès que l’on passe par leur représentation matérielle ils deviennent imprécis. Ce problème montre bien la rupture entre le monde physique de l’ " à peu près " et celui de la cohérence interne des mathématiques qui parfois peut laisser perplexe et qui mériterait d’être approfondi avec les élèves sourds qui ont tendance à ne croire que ce qu’ils voient et ne pas prendre certaines distances avec le réel.

Il apparaît donc à ce moment là, qu’elle confonde lignes et surfaces , je lui demande alors de colorier l’intérieur des figures. Christelle colorie la surface des figures fermées sans difficulté et colorie l’intérieur des replis des figures ouvertes,(comme un bol rempli). Je suppose alors une confusion entre surfaces et contenants , l’attribut du concept de surface : ligne fermée n’est pas acquis. Je lui montre alors avec le crayon que la couleur reste circonscrite à la figure fermée ; c’est une surface, mais qu’elle se diffuse au-delà de la figure ouverte par l’ouverture ; c’est une ligne. Je joins le langage des signes au dessin ; je signe que la ligne empêche la couleur de recouvrir la surface en dehors de l’aire. La conjugaison du dessin et du discours signé amène le " déclic ", Christelle achève l’activité sans se tromper et inscrit correctement le nom de la catégorie qui correspond à chaque figure.

Alors que j’écris ces dernières lignes je me souviens d’un commentaire de G Vergnaud13 qui paraphrasant Vygotski , met en lumière le rôle des interactions de tutelle: "  L’apprentissage avec autrui crée les conditions chez l’enfant de toute une série de processus de développement, lesquels ne se produisent que dans le cadre de la communication et de la collaboration avec des adultes ou avec des pairs, mais qui deviendront après coup une conquête pour l’enfant. ".

Les recherches des élèves menées autour des concepts de solide, de surface et de ligne nous ont permis d’établir le tabeau suivant comme une institutionnalisation de connaissances nouvelles :
 
Lignes Surfaces Solides
C’est ouvert ou fermé.

On ne peut pas la recouvrir.

C’est plat.

On peut la recouvrir.

C’est fermé.

On ne peut pas remplir et ça tombe.

Le contenu ne tombe pas.

On peut remplir.

Les bords protègent.

C’est fermé.


 
 
 

Il nous a semblé intéressant avant d’étudier les surfaces en tant que grandeurs de faire apparaître le lien existant entre ces trois concepts, à savoir qu’un solide est composé de surfaces qui délimitent l’espace intérieur de l’espace extérieur et que ces surfaces sont elles mêmes délimitées par des lignes fermées.

Nous distribuons la séance suivante les solides que les élèves avaient apportés (emballages alimentaires...) et nous leur expliquons que nous voulons passer d’une catégorie ; les solides à une autre ; les surfaces.

Les élèves découpent les solides ou décollent les parties fixes. Djibril propose d’ouvrir une boîte de conserve à l’aide d’un ouvre-boîte, nous ouvrons la boîte et découpons le cylindre que Djibril écrase, nous obtenons le patron d’un cylindre. Les élèves ont tous transformé leur solide en diverses surfaces qu’ils présentent à leurs camarades.

A présent nous demandons aux élèves de trouver les lignes sur les surfaces obtenues, ils font le tour des surfaces avec un feutre et différencient l’intérieur de la figure de la bordure extérieure, pour lesquels ils notent respectivement les noms : surface et ligne.

Pour achever la séance nous distribuons des patrons de solides qu’ils doivent reconstituer. En début de séance, si les élèves avaient rencontré des difficultés pour obtenir des surfaces à partir de solides, nous avions la possibilité de leur proposer la démarche inverse : construire des solides à partir de surfaces. Les élèves ont réalisé les volumes sans difficultés.

1-2-Au terme de cette recherche menée avec les élèves, nous pouvons dresser un premier constat ;

-L’enseignant ne peut en aucun cas faire l’économie d’une démarche didactique où les élèves sont des chercheurs, des acteurs dans la construction de leurs savoirs. C’est au cours de ses recherches que l’élève sourd va être confronté à des obstacles qu’il doit affronter pour accéder à la compréhension du concept étudié, ils vont lui permettre d’étayer son cheminement cognitif. On ne peut pas placer l’élève sourd dans une situation d’apprentissage du type " j"apprends, j"applique " , les mots d’une leçon sont bien souvent, pour eux, porteurs de non-sens, ou peuvent induire des contre-sens et au mieux apporter un sens fragmenté. Dans ce type de démarche où l’élève construit du sens dans l’action, les mots et les signes viennent ensuite et revêtent le sens que leur a donné l’expérimentation. Pour que les mots (ou les signes) apparaîssent il est nécessaire de les utiliser, d’en avoir besoin et de prendre conscience de l’aspect sémantique qu’ils recouvrent, (Pour utiliser les termes Aire et Surface les élèves doivent, auparavant, avoir pris conscience de leur différence).

-Contrairement à la méthode déductive qui passe par l’énoncé linguistique, ce qui n’est pas l’apanage de l’enfant sourd,  la méthode inductive est particulièrement intéressante dans ce type d’activité puisqu’elle invite à la participation active, elle stimule la recherche d’une solution. Mais avant tout, avec l’élève déficient auditif, elle aborde le concept par la perception ; l’élève prend le temps d’observer et de manipuler, puis il compare. Ensuite seulement intervient l’inférence qui donne la possibilité d’extraire les attributs essentiels du concept.

-Il est nécessaire avec les enfants sourds que l’enseignant prévoit différentes réponses à une consigne, anticipe sur les procédures possibles et les schèmes élaborés pour pouvoir recadrer la recherche quand le besoin s’en fait sentir en ayant selon le cas : de nouvelles pistes d’investigation et/ou le matériel disponible à proposer .

L’élève sourd interprète ses perceptions à travers ses propres représentations et son vécu, or ne disposant pas des informations verbales directes et indirectes auxquelles est exposé l’enfant entendant, il envisage parfois le réel sous des modalités différentes qui peuvent dérouter l’enseignant.

-Nous laissons après chaque séance une ou plusieurs traces écrites et/ou schématiques des recherches et des résultats obtenus par les élèves qu’ils conservent avec eux et auxquelles ils peuvent se reporter. Les tableaux et schémas sont beaucoup plus accessibles par les élèves que de longues phrases et les familiarisent à d’autres modes d’expression.

2)-CADRE DES GRANDEURS

Le développement dans l’enseignement du concept d’aire en tant que grandeur permet aux élèves d’établir les relations nécessaires entre les cadres géométriques et numériques.

Dans un premier temps nous ne voulions pas réduire l’approche des grandeurs à des calculs, ou l’utilisation de formules.Nous souhaitions aborder le concept d’aire de surfaces dans des situations de comparaison et de somme sans utiliser le nombre.

2-1-Comparaison de deux grandeurs

2-1-1-Comparaison directe de l’aire de deux surfaces:

1ère activité :

Distribution de deux surfaces de format très différent (annexe 3), les élèves nomment facilement la catégorie à laquelle appartiennent ces deux figures;  les surfaces. Les élèves doivent colorier l’aire de chaque surface, comparer et déterminer celle qui a la plus grande étendue. La comparaison est facile, les élèves distinguent aisément que l’aire d’une surface est plus étendue que l’autre par une estimation directe à l’œil nu. Notre objectif était que les élèves puissent prendre directement du sens avec les yeux, mais nous souhaitions aussi leur montrer les limites de ce type de perception pour cela, dans un second temps, nous distribuons aux élèves deux surfaces dont les aires sont difficiles à comparer à vue d’œil.

2ème activité :

Les élèves sont en phase de recherche et au bout de quelques temps des stratégies différentes commencent à émerger :

-Angélique découpe l’aire d’une surface pour qu’elle se superpose exactement à l’aire de l’autre et agence le surplus à la manière d’un puzzle. L’aire de la première surface n’étant pas recouverte par la deuxième, Angélique en déduit que l’aire de la première surface est plus étendue.

-Anis découpe les deux surfaces de manière à ce que les deux aires aient un tronc commun important, les surplus des deux aires sont suffisamment évocateurs pour pour qu'il puisse déterminer l'aire la plus étendue.

-Jamila décalque par transparence une des deux surfaces sur l’autre, le résultat n’étant pas parlant, elle change de stratégie et découpe en plusieurs morceaux l’aire d’une surface avec laquelle elle recouvre l’autre.

-Djibril, quant à lui, découpe le contour de chaque surface (périmètre) et les compare en les alignants l’un contre l’autre.

Nous sommes surpris et enthousiasmés par la diversité des procédures développées par les élèves : Superposition, Recouvrement, Découpage/ Recollement, Pliage , ce qui tend à contredire D.Colin14

qui affirmait : "  La première cause de l’échec (de l’enfant sourd) devant un problème est souvent l’insuffisance du répertoire des réponses disponibles ".

Angélique, Jamila, Anis et quelques autres ont utilisé des méthodes basées sur l’équidécomposabilité qui consiste en la décomposition des figures à comparer et la comparaison des morceaux ainsi obtenus. Ils ont découvert par eux-même le théorème en acte : " deux surfaces équidécomposables ont même aire ".

3ème activité :

Recherche d’aires égales : Nous distribuons à chaque élève des rectangles vierges, ils ont pour consigne de colorier une partie de la surface de manière à obtenir une aire coloriée égale à l’aire non coloriée. Deux procédures se mettent en place très rapidement : - par la mesure, -par le pliage.

Après la comparaison directe de deux aires, cette proposition de travail doit mener les élèves à dissocier l’aire de la surface, que pour une même aire on peut avoir des surfaces différentes. Ce qui parfois posera des problèmes  au niveau des représentations, et encouragera les élèves à se méfier des apparences pour que dans le doute ils apprennent à vérifier par une approche instrumentale.

Ainsi Hélèna plie sa feuille en 2 puis de nouveau en 2 et obtient 4 colonnes, elle en colorie une sur deux, Djibril plie aussi sa feuille en 4, obtient une " fenêtre " dont il colorie les ¼ opposés. Anis, Angélique et Laetitia mesurent leur rectangle et le partagent en 2 (horizontalement/verticalement) puis colorient une moitié.

Sofiane trace une diagonale et colorie une des deux parties. Djibril trace deux diagonales et colorie 2 secteurs angulaires opposés par le sommet. Jamila recherche la difficulté ; elle partage son rectangle en deux sous-rectangles dont elle trace pour chacun une diagonale, elle colorie ensuite une moitié de chaque rectangle. (Annexe 4).

Mise en commun

La mise en commun après chaque activité permet aux élèves de se rendre compte des différentes démarches mises en place par leurs camarades pour arriver, aux résultats et de mesurer la pertinence ou l’économie de moyen de telle ou telle autre méthode employée. C’est un climat de confiance qui règne dans la classe au cours des ateliers, les élèves n’hésitent pas à prendre la parole et sont valorisés losqu’ils viennent au tableau présenter leurs démarches. Il y a entre-eux un réel désir de partage de l’information. Les élèves échangent leur point de vue sur le concept, ou entrent dans un conflit socio-cognitif qu’ils doivent surmonter, en discutant pour se mettre d’accord, ces échanges sont très riches : non seulement parce que les élèves doivent argumenter et apporter des preuves à ce qu’ils avancent mais aussi parce qu’ils réinvestissent un vocabulaire mathématique signé qui porte du sens. Celui qui se trompait dans son raisonnement cherche à comprendre pourquoi . C’est le cas de Djibril qui vient présenter au tableau ses recherches et qui après coup, prend conscience qu’il a comparé des longueurs et non pas des aires (2ème activité). Un peu plus tard, Laetitia demandera à Djibril d’apporter la preuve que les aires des surfaces (coloriée et blanche) sont véritablement égales. (3ème activité).


Pour Laetitia comme pour les autres la preuve théorique ne suffit pas, ils ont besoin d’une confirmation visuelle. Or la figure présentée par Djibril laisse les élèves dubitatifs ! Djibril apporte la preuve par découpage et recollement des deux aires.

Là encore les élèves ont pris conscience des limites fournies par la perception visuelle et la prévalence de la méthode instrumentale ou théorique. Djibril a fait l’apprentissage de la démonstration comme un moyen pour expliquer un raisonnement, valider une preuve, socialiser un résultat, c’est de l’initiation au raisonnement déductif.

Ces interactions sociales donnent aux élèves l’occasion de prendre conscience des stratégies d’apprentissage qui leur permettent de construire leur savoir (métacognition). La nécessité de formuler les étapes de leur progression devant leurs camarades , les oblige à reconstituer mentalement leurs actions : l’action se transforme en image mentale puis adopte le mode symbolique de la langue signée pour l’argumentation.

La comparaison directe de l’aire de deux surfaces a permis aux élèves de travailler directement sur le concept géométrique de l’aire d’une surface sans être obligés de passer par la mesure et le nombre qui quantifie. Les élèves ont pu comparer directement l’aire des surfaces et non les mesures des aires de ces surfaces. Il aurait été dommageable de priver les élèves de ces types de stratégies devenues des schèmes opératoires transposables en passant directement de la comparaison à l’œil nu, à la comparaison avec un objet intermédiaire (transitivité).
 
 

2-1-2-Comparaison indirecte de l’aire de deux surfaces :

-Nous proposons aux élèves de comparer l’aire de deux surfaces; un paralèlogramme et un hexagone sans possibilité de comparaison directe (découpage,collage,pliage,transparence). Seule l’utilisation de l’aire d’un objet intermédiaire pour paver les deux surfaces permettrait la comparaison et c’est l’objectif de la séance. Nous avons envisagé l’hypothèse que cette situation didactique mène vers une impasse. Au bout d’une dizaine de minutes aucune procédure n’a émergé, les élèves sont dans l’expectative. Aussi nous proposons une nouvelle situation : nous distribuons à chaque élève 3 triangles (C,D,E) équilatéraux de taille différente, dont un beaucoup plus petit (C) pouvant servir d’instrument de mesure (étalon).

La consigne : " De combien E est-il plus grand que C ou de D ?" doit pouvoir entraîner l’utilisation du petit triangle comme étalon, ce n’est pas le cas !

-Nous décidons alors de supprimer une figure et de ne laisser que le grand triangle avec le plus petit, la consigne écrite et signée est adaptée à la modification : " De combien E est-il plus grand que C ?" . Le mot " combien " entraîne une réponse avec un nombre, il est prévu que les élèves quantifient. Nous entrons à présent dans le cadre des mesures de grandeurs, dans le cadre numérique.

3)-CADRE NUMERIQUE

On s’intéresse ici au passage d’une grandeur à un nombre. La possibilité d’attribuer un nombre à une grandeur sous-entend la possibilité de choisir une unité de mesure qui soit une aire elle-même, quelconque dans un premier temps (par la taille et la forme ; triangle , rectangle,carré) que nous appellerons étalon et qui deviendra conventionnelle par la suite.

Dans l’immédiat nos objectifs sont que les élèves découvrent que pour une même aire, il peut y avoir autant de mesures, de nombres que d’unités-étalons utilisées. Que l’utilisation d’une unité-étalon au profit d’une autre dépend de l’étendue de l’aire à mesurer.

-Revenons à présent à nos triangles :

Les élèves remplissent l’aire du grand triangle(E) avec l’aire du plus petit(C) qu’ils reportent en traçant les contours. L’aire de (E) a été prévue de manière à ce qu’elle soit un nombre entier de fois plus importante que l’aire de (C).(annexe 5).

Nous leur donnons le 3ième triangle en leur demandant de le mesurer, cela ne pose aucune difficulté. En traçant les contours de l’étalon à l’intérieure de l’aire à mesurer, les élèves tracent des lignes, nous nous méfions de ce type de représentation avec les enfants sourds et décidons à l’avenir de prévoir des étalons en quantité et découpés dans du papier de couleur que les élèves devront coller, ainsi la représentation du pavage d’une aire prendra plus de sens au niveau visuel, et l’activité sera moins fastidieuse (traçage). Le procédé de pavage permet de donner aux élèves l’intuition de ce qu’est une mesure.

-Lors de la mise en commun les élèves donnent les mesures des aires des trois surfaces :

Aire de la figure E = 25 aires du triangle C , Aire de la figure D = 9 aires du triangle C

Aire de la figure C = 1 aire du triangle C

Lors de la séance suivante nous reprenons les deux surfaces (parallèlogramme et hexagone) dont la mesure des aires avait laissé les élèves dans l’embarras.

Rapidement les élèves réinvestissent l’utilisation de l’aire du triangle (C) comme étalon pour paver les deux figures. Pour l’hexagone la mesure de son aire avec l’aire de l’étalon ne pose pas problème, par contre la mesure de l’aire du parallèlogramme place les élèves devant une difficulté majeure ; le pavage ne remplit pas entièrement l’aire de la surface, il reste des interstices. Comment faire pour éviter un pavage incomplet avec des " trous " ?

-Choix d’un autre étalon ? Réduction de l’étalon ? Intervention de la notion d’encadrement pour la mesure de l’aire par excès et par défaut ?

Stratégies développées par les élèves :-Youssef découpe selon ses besoins des morceaux d’étalon qu’il colle dans les interstices, il essaie d’utiliser toutes les chutes de chaque étalon qu’il subdivise. Il comptabilise chaque étalon utilisé entièrement.

-Loïc attribut un numéro à toute nouvelle unité utilisée et inscrit sur chacune des chutes son numéro de référence.

- Jamila consciente de la difficulté à paver le parallèlogramme, le transforme en rectangle de même aire (réinvestissement du travail mené sur les grandeurs).
 
 

Mais cela n’avance à rien la difficulté n’est pas supprimée, elle remplit les interstices avec des morceaux d’étalon qu’elle colle, et regroupe les chutes qu’elle n’utilise pas sur une unité-étalon afin de la reconstituer.

En fait, tous les élèves ont réinvesti la notion de pavage pour la mesure d’une aire, face au problème des interstices laissés par l’étalon tous pensent qu’il faut les combler sinon la mesure est incomplète. Mais rares sont ceux qui pensent à comptabiliser les subdivisions de l’étalon pour obtenir une mesure " exacte ". Christelle par exemple, complète les " trous " avec des morceaux d’étalon et des bouts de feuille blanche.

Nos objectifs la séance suivante sont :

-Que les élèves soient capables de subdiviser l’unité-étalon lorsqu’il reste des portions d’aire non recouvertes par l’étalon entier.

-Que les élèves soient capables de donner la mesure totale de l’aire en intégrant l’aire des subdivisions à celle des étalons complets.

Cette fois nous proposons aux élèves d’utiliser un étalon carré (5x5cm) qui servira d’unité. Le choix de changer d’étalon met en avant le fait que n’importe qu’elle aire peut servir d’étalon (par convention) à la condition qu’il soit adapté à l’aire qui doit être mesurée.

Nous distribuons aux élèves des surfaces qui pourront être pavées par les étalons carrés ou par des subdivisions de ces étalons correspondant à des moitiés d’étalons coupés dans le sens de la hauteur, ou en diagonale, pour ne pas complexifier davantage la tâche.
 
 

Stratégies mises en place par les élèves :

1ère étape : le recouvrement.

Les élèves recouvrent l’aire de la surface avec plusieurs étalons, d’autres les collent directement. Les moitiés d’étalons sont pliées ou coupées puis collées. Tous réussissent à paver entièrement la surface avec les étalons ou les moitiés d’étalons.

2ème étape : le calcul de l’aire.Compter les unités-étalons ne ne pose aucun problème, par contre Anis et Christelle rencontrent des difficultés au niveau spatial pour associer :

2 = 1 et 2 = 1

ainsi que que des difficultés conceptuelles pour associer :

1 + 1 = 1

Par découpage et recollement Anis et Christelle ont pu valider les trois égalités ci-dessus. Preuve en est que le travail sur les aires en tant que GRANDEURS n’est pas superflu.

Les élèves ont donné la mesure exacte de l’aire de la figure à mesurer (12,5 étalons-unités).

Les élèves ont dans la majorité intégré le fait que l’étalon utilisé a une aire fixée mais que cette aire n’est pas associée à un support particulier. Ils s’en sont aperçus encore une fois lorsqu’ils ont eu à ajouter 2 moitiés d’étalon qui n’avaient pas la même forme pour obtenir une unité-étalon complète.(Voir ci-dessus).

Lors de la séance suivante le centimètre-carré fut introduit comme étant une unité d’aire conventionnelle et universelle.

Nous nous sommes trouvés à la croisées des chemins avec la possibilité de poursuivre l’atelier dans deux directions :

-Mener une activité qui serait centrée la découverte des autres unités de mesure d’aire (dm2,m2,a,ha,km2) et les liens existants entre ces diverses unités.

-Ou aborder les difficultés d’apprentissage liées à la dissociation de l’aire et du périmètre.

Notre choix s’est arrêté sur la deuxième proposition parce que nous allions travailler sur un nouveau concept qui par son caractère perceptif n’est pas évident: Aire et périmètre ne varient pas dans le même sens ; l’aire d’une surface peut augmenter et voir son périmètre diminuer et pour une même aire les périmètres de plusieurs surfaces peuvent être différents.
 
 


CONCLUSION




Au cours des séances d’ateliers mathématiques nous avons noté une forte adhésion de la part des élèves, une véritable envie de s’engouffrer dans la recherche qui a suscité des résistances, des propositions, des erreurs, des questionnements qui ont témoigné de leur présence dans l’activité mathématique.

Il n’est pas nécessaire d’avoir des dispositions particulières en mathématiques pour faire des mathématiques et réussir à développer les compétences nécessaires pour s’approprier des concepts, et les différentes surdités de ces élèves n’en ont pas gêné les acquisitions.

A cela on peut adjoindre le mérite de plusieurs facteurs :

-Le fait de disposer d’un moyen de communication (la L.S.F) suffisamment pertinent pour

permettre tous les échanges entre les différents intervenants lors des confrontations collectives ou

lors des guidances individualisées.

-De favoriser le dialogue entre pairs , la formulation et la confrontation des idées.

-Notre volonté de proposer des situations de recherche qui prenaient appui sur l’observation et

l’analyse des démarches et représentations des élèves qui éprouvaient des difficultés .

-La possibilité donnée aux élèves de générer des hypothèses, de les tester par l’expérience ou

l’activité sensori-motrice, d’inférer à partir de référents.

-D’associer le statut de l’erreur non pas à une faute mais à un objet de pensée incontournable qui

permet de baliser la recherche et qui dans ce sens ne nuit pas à la créativité des élèves.

-De s’assurer que l’élève avant de commencer toute activité ait bien compris la consigne et

l’objectif visé.

Je n’ai pas constaté, au cours de ces séances, de spécificités cognitives particulières, liées à la surdité lors de l’acquisition d’un concept. Les particularités rencontrées avec ces élèves sont d’ordre perceptif : primauté du visuel, appétence aux détails, manque parfois de globalité, mais elles peuvent par contre avoir une influence certaine sur la cognition de ces enfants. Pour cela, il est important que le maître spécialisé option A qui a en charge ces élèves puisse les amener à se démarquer de la perception visuelle pour qu’ils accèdent à une approche scientifique des mathématiques . L’objectif étant que l’élève sourd sache procéder à une catégorisation instrumentale quand la catégorisation perceptive ne donne pas de réponse de manière évidente et surtout d’une manière générale ; apprendre à s’en méfier.

Mais on ne peut, ni on ne doit empêcher la prise de contact visuel, direct, immédiat qui permet en même temps une compréhension intime avec l’objet. On peut appeler cela intuition qu’il est nécessaire de faire évoluer grâce aux expériences menées en classe, aux concepts ainsi construits qui deviennent des outils mathématiques transférables permettant l’établissement de nouveaux schèmes face à des situations inconnues.

 "  Être géomètre c’est ne pas confondre une évidence issue de l’intuition avec un renseignement issu de l’expérience et le résultat d’une expérience avec la conclusion d’un raisonnement. "  (C.Houdement/A.Kuzniak15).

L’élève doit apprendre à identifier et nommer les objets de la géométrie, pour cela il doit s’approprier le langage conventionnel de la géométrie, porteur des signifiés qui lui permettront de " fabriquer " sa pensée, de la mémoriser et pas seulement de l’exprimer. Le langage signé et le français seront associés rapidement dans le cas d’un projet bilingue pas uniquement par convention

mais étant donné que l’élève sourd est plus dans le monde sensible que dans le monde oral et linguistique, il peut être amené à rencontrer des termes géométriques qui fonctionnent " à rebours " du langage ordinaire et lui poseront problème, la langue des signes sera une aide précieuse pour distinguer l’un de l’autre. Ainsi, par exemple le sommet d’un triangle n’est pas toujours situé vers le haut contrairement au sommet de la montagne.

Cette difficulté n’est pas réservée au domaine géométrique, la distinction sens figuré et imagé est omniprésente dans la langue française : " Prendre la porte, il tombe des cordes, bouche d’égout... ".

Il conviendra de confronter les élèves aux multiples usages d’un même mot en fonction des contextes.

Pour terminer j’ajouterai que la géométrie et les mathématiques en général participent à l’enrichissement de l’emploi de la langue, en particulier par la pratique de l’argumentation. Ainsi que d’autres disciplines , les mathématiques prennent en charge l’apprentissage de différentes formes d’expression : les nombres, la figure, les graphiques, les tableaux, les schémas. Ces formes variées d’expression sont entrées dans notre quotidien, elles exigent une maîtrise que l’élève sourd doit acquérir.
 
 
 
 

NOTES
 
 
 
 

(1)-BO n°3 du 8 mai 1997, Décret 97-425 du 25/04/97 rénovation du capsais.

(2)-C.Courtin, Surdité, langue des signes et développement cognitif , thèse de doctorat en

psychologie, Université Paris V –René Descartes, Institut de psychologie,1998.

(3)-L.Berk, " Pourquoi les enfants parlent tout seuls ", Pour la Science,n°207bis.1995.

(4)-M.Poizat, La voix sourde, Métailié.

(5)-P.Oléron, Langage et développement mental, Bruxelles ; Charles Dessart.

(6)-B.Virole, Psychologie de la surdité, DeBoeck Université,1996.

(7)-S.Vinter, " Premières émissions orales des bébés sourds et interactions sociales ",Nouvelle

Revue de l’AIS,n°13,2001.

(8)-C.Brabant, "  L’apport du K.ABC à la compréhension des troubles cognitifs chez les enfants

sourds ", Les Cahiers de l’Audition-Vol 9-n°3,1997.

(9)-B.Douet cité par C.Brabant dans : " L’apport du K.ABC à la compréhension des troubles

cognitifs chez les enfants sourds ", Les Cahiers de l’Audition- Vol 9-n°3,1997.

(10)-J.C.Lafon, Les enfants déficients auditifs, avec la coll. De Vinter.S, Genin.P, Ed Masson.1985.

(11)-B-M.Barth, L’apprentissage de l’abstraction, Retz Pédagogie.1987.

(12)-G.Vergnaud, "  La théorie des champs conceptuels", Recherche en didactique des

mathématiques , Vol 10/3.3-1991.

(13)-G.Vergnaud, Lev Vygotski Pédagogue et penseur de notre temps, Portraits d’éducateurs,

Hachette Education, 2000.

(14)-D.Colin, Psychologie de l’enfant sourd, Collection d’Orthophonie, Ed.Masson .

(15)-C.Houdement, A.Kuzniak, " Géométrie et paradigmes géométriques ",Petit x -n°51, 1998-99.
 
 




BIBLIOGRAPHIE








-BARTH (B-M), L’apprentissage de l’abstraction, Retz Pédagogie.1987.

-BASSIS (O), Mathématiques : les enfants prennent le pouvoir. Education Fernand Nathan.1985.

-BERK (L), " Pourquoi les enfants parlent tout seuls ", POUR LA SCIENCE, n°207bis.1995.

-BEXIGA (V), De la conceptualisation chez l’élève sourd, Mémoire capsais. 2000.

-BRABANT (C), " L’apport du K.ABC à la compréhension des troubles cognitifs chez les enfants sourds ", Les Cahiers de l’Audition-vol.9-n°3.1996.

-COLIN (D), Psychologie de l’enfant sourd , Collection d’Orthophonie, Ed.Masson.

-COURTIN (C), " Le cas des théories de l"esprit chez les enfants sourds : l"impact de la langue des signes ",Enfance n°3, p.248 à 257. 1999.

-GILLIG (J-M), Intégrer l’enfant handicapé à l’école, 2ième édition, Ed.Dunod,1999.

-COURTIN (C), Surdité, langue des signes et développement cognitif, Thèse de doctorat de psychologie ,Université Paris V-René Descartes-Institut de psychologie.1998.

-GOFFIN (M), Le cri du silence, Bernard Gilson Editeur, 1996.

-HOUDE (O), MELJAC (C), sous la direction de, L’esprit piagétien, hommage international -à Jean Piaget , Ed PUF- Psychologie et sciences de la pensée.

-HOUDEMENT (C), KUZNIAK (A), " Géomérie et paradigmes géométriques ", Petit x n°51, p5 à 21, 1998-1999.

-LABORIT (E), Le cri de la mouette, Ed. Robert Laffont, 1994.

-MOREIRA BALTAR (P), " Une étude de situations et d"invariants : outil pour l "analyse de la construction du concept d"aire au collège ", Petit x n°49, p45 à 78, 1998-1999.

-PIAJET (J), Six études de psychologie, Denoel, p 119 à 133,1964.

-PICOT (M), " Pavage du plan par des quadrilatères ", Repères IREM n°37, Octobre 1999

-VERGNAUD (G), " La théorie des champs conceptuels ", Recherche en didactique des mathématiques.Vol 10/3.3.1991.

-VERGNAUD (G), Lev Vygotski Pédagogue et penseur de notre temps, Portraits d’éducateurs, Hachette Education,2000.

-VIROLE (B), " Evaluation et remédiation des difficultés cognitives de l’enfant sourd ", Les Cahiers de l’Audition-vol.9-n°3.1996.

-VIROLE (B), Psychologie de la surdité, DeBoeck Université, 1996

-VINTER (S), " Premières émissions orales des bébés sourds et interactions sociales" , Nouvelle revue de l’AIS,N°13, 2001.

TEXTES OFFICIELS :

-Ministère de l’Education Nationale, de la Recherche et de la Technologie, Enseigner au collège, Programmes et accompagnement, Mathématiques, CNDP 1999.

-Accompagnement des programmes de SEGPA, livret 1 : Mathématiques,Physique-Chimie,Technologie. Collection Collège, CNDP,1999.

-Ministère de l’Education Nationale, Programmes de l’école primaire, CNDP,1995.